

Au Mali, la junte suspend "jusqu'à nouvel ordre" les activités des partis politiques
La junte au pouvoir au Mali a annoncé mercredi la suspension "jusqu'à nouvel ordre" des partis et des associations à caractère politique, invoquant une "raison d'ordre public", alors qu'une nouvelle coalition d'opposition appelle à la mobilisation depuis plusieurs jours.
Cette restriction supplémentaire à toute expression d'opposition sous la junte intervient après que la coalition de partis politiques a appelé à manifester vendredi contre leur possible dissolution et en faveur d'un retour à l'ordre constitutionnel dans le pays.
"Sont suspendus jusqu'à nouvel ordre pour raison d'ordre public les activités des partis politiques sur toute l'étendue du territoire national", indique un décret signé par le chef de la junte malienne, le général Assimi Goïta, et lu à la radiotélévision nationale.
"La mesure de suspension s'applique aux activités des associations à caractère politique et aux activités de toute autre organisation se réclamant d'un caractère politique", poursuit le décret.
Cette mesure constitue un nouvel acte de répression des voix dissidentes et de réduction de l'espace civique dans ce pays d'Afrique de l'Ouest dirigé par des militaires depuis deux coups d'Etat, en 2020 et en 2021.
Le 30 avril, les autorités avaient annoncé l'abrogation de la loi encadrant le fonctionnement des partis politiques, une décision interprétée par des juristes comme une étape vers leur dissolution.
Craignant cette dissolution, une coalition d'une centaine de partis s'est formée pour "exiger la fin effective de la transition politico-militaire au plus tard le 31 décembre 2025" et appeler "à la mise en place d'un calendrier de retour rapide à l'ordre constitutionnel".
- "A bas la dictature!" -
La nouvelle coalition a déjà réussi à mobiliser plusieurs centaines de personnes lors d'une manifestation samedi dernier à Bamako. Un acte de protestation rare depuis l'arrivée au pouvoir de la junte.
"Vive la démocratie, à bas la dictature!", avaient scandé des protestataires réunis au Palais de la Culture.
Une trentaine de partisans de la junte qui ont voulu empêcher la tenue de la manifestation avaient été dispersés par les forces de sécurité.
En 2024, les autorités maliennes avaient déjà suspendu les activités des partis politiques pendant trois mois.
Fin avril, une concertation nationale organisée par le régime à Bamako, largement boycottée par les partis d'opposition, avait recommandé la suppression pure et simple des partis politiques.
La concertation a également proposé de proclamer le chef de la junte, le général Goïta, président de la République pour un mandat de cinq ans renouvelable, sans passer par les urnes.
Depuis les coups d'État de 2020 et 2021, l'opposition malienne a été affaiblie par des mesures de rétorsion, des poursuites judiciaires, la dissolution de plusieurs organisations et un discours dominant appelant à l'unité autour du pouvoir militaire.
Le pays est en proie depuis 2012 aux violences de groupes jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique (EI) ainsi qu'à celles de groupes communautaires et crapuleux.
Le multipartisme, ainsi que les libertés d'expression et d'association, sont garantis par la Constitution malienne de 1992, puis ont été réaffirmés dans la nouvelle loi fondamentale promulguée en 2023 par la junte.
C.Wieser--SbgTB